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🔍 Pourquoi les filles HPI, TDAH ou TSA passent-elles sous les radars ?

Un article complet pour mieux comprendre (et faire avancer les choses)



Pourquoi ? Parce qu'on ne les attend pas dans ces fonctionnements-là — ceux qu'on a, à tort, associés aux garçons bruyants, agités ou solitaires. Parce que les outils de dépistage ont été conçus à partir d'observations faites majoritairement sur des garçons. Et parce que les filles ont développé, souvent très jeunes, des stratégies de camouflage redoutablement efficaces.


Des chiffres qui bougent, mais pas assez vite

En 2020, une étude de la Haute Autorité de Santé (HAS) indiquait encore un ratio de 4 garçons pour 1 fille diagnostiqués TSA. Pour le TDAH, on parlait de 3 garçons pour 1 fille, même si les chercheurs parlent désormais d'un ratio plus équilibré, proche de 4 garçons pour 3 filles, notamment à l'âge adulte.

Concernant le HPI, aucune étude officielle ne montre une différence nette entre les sexes au niveau de la répartition dans la population générale… pourtant, dans les établissements spécialisés et les consultations, les filles sont nettement sous-représentées.

Ce décalage ne signifie pas qu'il y a moins de filles neuroatypiques. Il signifie qu'elles ne sont pas vues, pas détectées, ou détectées beaucoup plus tard — souvent à l'adolescence ou à l'âge adulte, quand le masque commence à se fissurer sous le poids de l'épuisement.


HPI au féminin : l'intelligence camouflée

Chez les filles à haut potentiel, l'intelligence ne se manifeste pas toujours de façon spectaculaire ou dérangeante. Contrairement aux garçons HPI qui peuvent se faire remarquer par leur opposition, leur ennui affiché ou leur comportement provocateur, les filles ont souvent intégré très tôt l'importance de la conformité sociale.

Elles peuvent être de très bonnes élèves, appliquées, discrètes, soucieuses de bien faire et de plaire aux adultes. Elles se fondent dans le moule, réussissent sans faire de vagues. Leurs questionnements existentiels profonds, leur besoin d'absolu, leur hypersensibilité émotionnelle ou leur perfectionnisme écrasant sont souvent mis sur le compte de leur personnalité, de leur éducation ou… de leur adolescence.


Les signes invisibilisés :

  • Une pensée complexe et nuancée qu'elles gardent pour elles

  • Une anxiété de performance cachée derrière de bonnes notes

  • Un sentiment de décalage avec les autres filles de leur âge

  • Des intérêts intenses, mais socialement "acceptables" (lecture, chevaux, nature...)

  • Une maturité émotionnelle précoce qui peut sembler "normale" pour une fille

Le camouflage, la peur de décevoir, la pression à la conformité sociale, le désir d'être aimée et acceptée sont autant de facteurs qui les poussent à dissimuler leur différence. Résultat : peu d'alertes, peu de bilans, et un repérage très tardif — souvent à l'âge adulte, quand le masque commence à peser et que les premiers signes d'épuisement apparaissent (anxiété, dépression, burn-out).


TDAH chez les filles : l'hyperactivité… mentale

Chez les filles, le TDAH se manifeste plus souvent par de l'inattention plutôt que par de l'hyperactivité motrice. Elles sont rêveuses, "dans la lune", distraites. Elles oublient leurs affaires, perdent le fil en classe, ont du mal à s'organiser. Mais elles ne dérangent pas. Elles ne courent pas partout, ne grimpent pas sur les tables, ne coupent pas la parole de façon impulsive.

Leur hyperactivité est mentale : un tourbillon de pensées incessantes, une difficulté à ralentir le rythme cérébral, une tendance à ruminer, à s'inquiéter, à passer du coq à l'âne dans leur tête. Mais tout cela reste invisible.


Les signes invisibilisés :

  • Une désorganisation chronique compensée par des stratégies (agendas multiples, listes, rappels)

  • Une procrastination intense suivie de phases de sur-productivité

  • Des oublis constants mais gérés avec culpabilité et excuses

  • Une hypersensibilité émotionnelle interprétée comme de la fragilité

  • Une fatigabilité attentionnelle qu'elles cachent par politesse

Une fillette rêveuse, distraite, un peu "dans la lune" en classe, sera moins repérée qu'un garçon qui perturbe. Et comme elle peut aussi être polie, gentille, souriante et sociable, elle échappe souvent à l'attention des enseignants ou des médecins scolaires. On lui dira qu'elle "pourrait faire mieux si elle s'en donnait la peine", qu'elle "manque de concentration", qu'elle devrait "faire plus d'efforts".

Le diagnostic arrive souvent à l'adolescence ou à l'âge adulte, quand les stratégies de compensation ne suffisent plus et que l'épuisement devient trop lourd à porter.


TSA au féminin : des masques très efficaces

Le TSA chez les filles est probablement le plus difficile à détecter. Pourquoi ? Parce qu'elles développent dès l'enfance des stratégies d'imitation sociale redoutablement efficaces.

Elles observent les autres filles avec une attention quasi-scientifique. Elles copient les expressions faciales, les intonations, les gestes, les codes vestimentaires. Elles analysent les interactions sociales comme un manuel d'instructions à apprendre par cœur… sans pour autant les comprendre intuitivement. Elles jouent un rôle, en permanence.


Les signes invisibilisés :

  • Des amitiés qui semblent normales mais qui sont en réalité épuisantes et scriptées

  • Des intérêts intenses mais socialement acceptables (animaux, psychologie, lecture)

  • Une hypersensibilité sensorielle masquée (elles supportent en silence, puis explosent à la maison)

  • Des routines rigides mais discrètes (toujours le même petit-déjeuner, le même trajet, les mêmes vêtements)

  • Un épuisement social intense après les interactions

Elles s'adaptent, mais au prix d'une fatigue énorme. Elles masquent leurs particularités sensorielles (le bruit de la cantine qui les agresse, les étiquettes de vêtements qui les irritent, les lumières trop vives). Elles surjouent les émotions attendues (sourire, remercier, montrer de l'enthousiasme alors qu'elles sont surchargées). Elles évitent les situations sociales stressantes en trouvant des prétextes socialement acceptables.

Et elles finissent par s'épuiser à force de vouloir être comme les autres. C'est souvent à l'adolescence ou au début de l'âge adulte que le masque craque : anxiété sévère, dépression, burn-out, mutisme sélectif, troubles alimentaires. Le corps et l'esprit disent "stop".


Quand tout se superpose : TDAH, TSA et HPI chez une même personne

Et puis, il y a celles qui cumulent. Celles chez qui les traits du TDAH (inattention, impulsivité mentale, désorganisation) se mélangent à ceux du TSA (difficultés sociales, particularités sensorielles, besoin de routine), le tout enveloppé dans une pensée en arborescence et une grande rapidité cognitive propre au haut potentiel intellectuel.

Dans ces cas-là, le haut potentiel agit parfois comme un "cache-misère" : il permet de compenser, de contourner, de masquer… mais au prix d'une fatigue mentale colossale.

Ces femmes peuvent analyser les codes sociaux comme un manuel d'instruction, rationaliser ce qu'elles ne ressentent pas intuitivement, ou encore surcompenser leur désorganisation interne par une hyperadaptabilité extérieure. Elles anticipent, elles planifient, elles analysent, elles compensent. En permanence.

Résultat : elles passent encore plus inaperçues, même dans les bilans neuropsychologiques ou les consultations spécialisées. Les professionnels voient une femme intelligente, articulée, capable d'analyser finement son propre fonctionnement. Ils ne voient pas toujours l'épuisement que cela représente, ni le coût psychique de cette adaptation constante.

Mais cette triple casquette n'a rien d'un privilège. Elle complique l'accès à un diagnostic clair, ralentit la mise en place des adaptations nécessaires, et alourdit la charge mentale au quotidien. Il faut penser plus vite, gérer plus fort, sentir plus intensément… tout en camouflant ce qui déborde, ce qui fatigue, ce qui fait mal.


Conséquences à tous les âges


Dans l'enfance

  • Anxiété de performance, perfectionnisme écrasant

  • Sentiment de ne jamais être "assez bien"

  • Fatigue chronique invisible

  • Difficultés relationnelles non comprises

  • Absence d'aménagements scolaires adaptés


À l'adolescence

  • Crise identitaire profonde ("Qui suis-je vraiment ?")

  • Risque accru de dépression, troubles anxieux

  • Troubles alimentaires (besoin de contrôle)

  • Isolement social croissant

  • Décrochage scolaire malgré les capacités


À l'âge adulte

  • Burn-out à répétition

  • Syndrome de l'imposteur

  • Difficultés dans les relations intimes (impossibilité de "baisser le masque")

  • Épuisement maternel si elles ont des enfants

  • Diagnostic tardif, souvent après des années d'errance médicale


Que faire pour mieux les repérer ?


Former les professionnels

Médecins, enseignants, psychologues doivent être sensibilisés aux manifestations spécifiques de la neuroatypie chez les filles. Les grilles d'observation doivent évoluer pour inclure des critères féminins.

Écouter les mères

Souvent, ce sont les mères qui sentent que quelque chose ne va pas, même si leur fille "réussit bien" ou "n'a pas de problème apparent". Leur intuition doit être prise au sérieux.

Regarder au-delà des résultats scolaires

Une fille qui réussit peut aussi être en souffrance. Les notes ne disent rien de l'effort déployé, de l'anxiété sous-jacente, de l'épuisement quotidien.

Poser les bonnes questions

"Comment te sens-tu après une journée d'école ?" "As-tu l'impression de jouer un rôle avec tes amis ?" "Es-tu souvent fatiguée sans raison ?" "Y a-t-il des choses que tu fais facilement à l'école mais qui t'épuisent à la maison ?"

Valoriser l'authenticitéCréer des espaces où les filles peuvent exister sans masque, exprimer leurs difficultés sans culpabilité, être elles-mêmes sans peur du jugement.


En conclusion


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Il n'y a pas une seule manière d'être HPI, TDAH ou TSA. Et les filles méritent autant que les garçons d'être vues, entendues, comprises et accompagnées avec justesse.

Derrière chaque fille "discrète", "rêveuse", "trop sensible" ou "trop sérieuse", il y a peut-être une neuroatypie invisible. Derrière chaque femme épuisée, en burn-out, perdue, il y a peut-être des années de camouflage et de suradaptation.

Il est temps de changer nos grilles de lecture. Il est temps de voir les filles neuroatypiques non pas comme elles essaient de paraître, mais comme elles sont vraiment.


Chez Aladin, nous accompagnons les jeunes filles et les femmes neuroatypiques dans leur chemin vers un diagnostic, une meilleure compréhension d'elles-mêmes, et la possibilité de déposer enfin leur masque.


Vous vous reconnaissez dans ces descriptions ? Vous êtes parent d'une fille que vous sentez différente mais qui passe inaperçue ? N'hésitez pas à nous contacter. Être vue, c'est déjà un premier pas vers l'apaisement.

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